Interviews

Docteure Anne Marilyse Kouadio « L’école n’est pas gratuite en Côte d’Ivoire »

Au cours d’une conférence débat intitulé ” Café du monde” organisée par l’association démocratie des Français de l’étranger ( ADFE) section Côte d’Ivoire, autour du thème : « L’égalité entre les femmes et les hommes : quelle réalité en Côte d’Ivoire ? » , Docteure Anne Marilyse Kouadio, Maître de Conférences en géographie sociale, est intervenue sur ”l’accès des femmes aux ressources, qui est fondamentalement un obstacle dans leur contribution, participation au développement en Côte d’Ivoire ”. C’était le 8 avril 2021, au Buschmen café sise à Abidjan Cocody.

A l’issue de cette conférence débat riche en partage d’expérience, Dr Anne Marilyse Kouadio a accordé une interview à Ivoire24.info .

Dans votre exposé, vous avez parlé des ressources. De quelles ressources réellement ?

J’ai préféré insister sur les ressources relatives d’une part à l’éducation et la santé et d’autre part l’accès des femmes à la propriété foncière et leur droit à la succession. C’est autour des deux grands axes que j’ai échangés avec l’Association Démocratique des Français de l’Étranger.

Pensez-vous que les choses avancent comme il se doit ?

Les lignes bougent, l’Etat de Côte d’Ivoire essaie de prendre des dispositions pour permettre aux femmes de s’épanouir. Comme j’ai dit quand on parle des ressources, il s’agit des moyens de production nécessaires pour agir, produire et participer au développement du pays. Elles sont surtout économiques et sociales, se déclinant essentiellement comme suit :
– Les services sociaux de base : en matière d’éducation, de santé,
– L’accès à la propriété foncière et au droit de succession. Il y a des lois, des dispositions légales qui sont mises en place. Mais il y a toujours de la résistance, parce qu’on a l’impression qu’il y a un paradoxe.

Un paradoxe à quel niveau ?

Au niveau des rapports entre hommes et femmes. On pourrait prendre l’exemple au niveau de l’éducation, l’État demande de 06 à 16 ans que tous les enfants aillent à l’école. Et on se rend compte que parmi les enfants qui ne vont pas à l’école, la majorité est constituée de filles. Et donc, on cherche à savoir pourquoi ça se passe comme ça.

Selon vous, quelles sont les raisons ?

Ça se passe comme ça parce que l’école n’est pas gratuite ; c’est une bonne chose de mettre les enfants à l’école, d’obliger les enfants de 06 à 16 ans à être à l’école. L’école n’est pas gratuite, il faudrait que les parents mettent la main à la poche. Mais, nombreux sont les parents qui vivent dans l’indigence. Le fait que l’école ne soit pas gratuite est un obstacle majeur à l’accès des filles à l’école. Parce que souvent, on entend dans la littérature, on entend parler de discriminations sociales, discriminations socio-culturelles. Mais ses discriminations continuent, parce qu’au niveau économique, même les lignes ne bougent pas réellement ; l’école est gratuite sur papier, mais elle ne l’est pas réellement dans les faits.

Qu’est-ce qui vous fait dire que l’école n’est pas gratuite ?

Quand on rentre dans les détails, l’école n’est pas réellement gratuite. Je le dis tantôt, 36 % des enfants qui vont à l’école ne finissent pas le cycle primaire. Plus de 25 % d’enfants qui doivent être à l’école n’y sont pas. Et dans cette proportion, la majorité est constituée de filles. L’Etat fait des efforts, on voit des dispositions qui sont prises, des investissements.
À côté de cela, j’ai insisté sur le fait qu’on dit toujours que 44 % du budget de la Côte d’Ivoire est du ressort de l’éducation. Mais l’état investit combien dans l’éducation ?
On est obligé de tendre la main ailleurs dans les organisations internationales, la France, nos principaux bailleurs économiques.

Que doit faire l’état pour remédier aux insuffisances ?

Nous-même en Côte d’Ivoire, on doit savoir que la formation, l’éducation est d’une importance capitale pour le développement. Parce qu’un Etat fort, est un Etat qui forme sa jeunesse. ‘’ L’éducation s’applique aux deux genres ; ce sont les filles et les garçons”. Cela doit être une éducation au-delà des slogans politiques, elle doit être une priorité dans les détails. Former une femme ; c’est fondé une nation. La cote d’ivoire n’a pas opté pour l’égalité des sexes, mais, la cote d’ivoire a opté pour l’égalité des chances et l’équité de genre. C’est-à-dire permettre à tous avec ce qu’ils ont de pouvoir accéder au développement. Et il faudrait que les femmes prennent la mesure, on n’est pas en train d’être en concurrence d’égalité avec les hommes. Ici, l’équité de genre est un outil méthodologique pour analyser des relations hommes-femmes, c’est une approche de développement.

Quel est votre mot de fin ?

La femme doit savoir qu’elle est une actrice de développement, mais il y a des paradigmes qui doivent changer. La femme et l’homme sont complémentaires.

 

Entretien réalisé par Patrick Kouamien

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